La neutralité du net : de quoi parle-t-on ?

Officiellement révoqué aux États-Unis le 11 juin 2018, le principe de neutralité du net veut que tous les contenus disponibles sur le web, quel qu’en soit le format, soient traités de façon égalitaire et sans aucune forme de « discrimination » par les fournisseurs d’accès à Internet (FAI). Décryptage. 

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Qu’est-ce que la neutralité du net (et pourquoi est-ce si important) ?

L’expression « neutralité du net » est apparue pour la première fois en 2003, aux États-Unis, suite à la parution de l’étude « Discrimination en ligne » du professeur Tim Wu (Université de Columbia) dans la revue Journal of Telecommunications and High Technology Law. Wu démontrait, exemples à l’appui, que les fournisseurs d’accès à internet (FAI) avaient de plus en plus tendance à « discriminer » des contenus et à compromettre la liberté des utilisateurs à choisir eux-mêmes leur documentation. C’est dans la conclusion de son étude qu’il conceptualise le principe de la neutralité du net.

Concrètement, la neutralité du web « ignore » la notoriété et le format de contenu (texte, image vidéo) pour garantir un droit d’accès à toutes les ressources sur le web et à la même vitesse. Le principe de neutralité interdit aux FAI de bloquer l’accès à certains sites ou services en ligne. Ils doivent donc « traiter » les contenus qu’ils vous acheminent de manière égalitaire, sans privilèges ou discrimination. Si l’expression est nouvelle, la neutralité du web trouve son origine dans les principes fondateurs du net, notamment le principe de non-discrimination des contenus et celui de « meilleur effort » (ou « best effort delivery », c’est-à-dire que les FAI ne donnent aucune garantie de débit aux utilisateurs. Cette dernière étant conditionnée par la charge de trafic sur le réseau).

Internet à deux vitesses : et si le net n’était plus neutre ?

Imaginez le web comme une autoroute où tous les véhicules sont tenus de respecter la même limite de vitesse (ce qui est le cas pour les flux d’information dans le cadre de la neutralité du net). Imaginez maintenant que l’instance qui régule le trafic sur l’autoroute (les fournisseurs d’accès), décide de segmenter l’autoroute en 2 voies, chacune avec une limite de vitesse différente. L’organisme en charge pourra décider de donner accès, selon ses critères, aux véhicules qui pourront rouler sur la voie rapide, et reléguer à la voie lente tous les autres. 

Si le principe de neutralité du net n’est plus appliqué, les fournisseurs d’accès pourront bloquer ou ralentir des données et en privilégier d’autres. C’est déjà le cas aux États-Unis, où Comcast a interdit à ses abonnés l’accès aux VPN. Les fournisseurs d’accès sont libres de bloquer ou de ralentir certains types de contenus (streaming vidéo par exemple) pour favoriser d’autres ressources pour des raisons commerciales, notamment. L’incidence sur le principe de libre concurrence est évidente : si les fournisseurs « ventilent » les sites sur les deux voies de l’autoroute de l’information, ils influencent indirectement le flux des annonceurs et des revenus pour les rediriger vers les sites privilégiés. Dans cette configuration, les FAI peuvent même exiger des frais supplémentaires pour accéder aux contenus les plus plébiscités, comme c’est déjà le cas au Portugal.

Quid de la neutralité du net en France ?

En France, c’est l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) qui garantit la neutralité du net. Par ailleurs, le principe de neutralité du net est inscrit dans le droit français par la loi pour une République numérique du 8 octobre 2016. Cette loi donne à l’Arcep la compétence (et les moyens légaux) de mener des enquêtes et d’infliger des sanctions aux opérateurs réfractaires. La loi interdit aux fournisseurs d’accès toute forme de discrimination (d’accès, de vitesse de navigation, de type d’usage…) ainsi que la pratique du « zero-rating » qui consiste à favoriser l’accès à certains sites que les FAI ne facturent pas au forfait de l’utilisateur.

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